Les robots
Trois par trois, en rangs
Vont les robots, bardés de chair et de sang
Ils ont tous le pas
Un robot ne perd pas le pas, il ne peut pas
Ils ont à la main
Comme une bêche, mais ce n’est pas une bêche
Ils vont leur chemin
Comme au jardin, mais ils ne vont pas au jardin
Au jardin, le jardinier s’affaire lentement
Comme quand on a tout son temps
Il faut endormir la terre
Il faut cacher le printemps
Juste entre l’arbre et l’écorce
Et le jardinier s’efforce
D’enlever au vent vivant
Une odeur brûlée
De l’automne
Les robots sont beaux
L’or et l’argent ont la couleur de leur peau
Pas de déserteur
Un robot ne sait pas la couleur de la peur
Ils suivent de loin
Comme un navire, mais ce n’est pas un navire
N’en ont pas besoin
Comme la mer, mais ils ne vont pas sur la mer
Sur la mer, un vieux pêcheur s’allume lentement
Comme quand on a tout son temps
Il faut cajoler la brume
De la voile et de l’avant
Fendre le poisson, la lame
Donner du corps et de l’âme
Et laisser parler l’enfant
Neige peut neiger
Sur l’eau grise
Vingt par vingt, en sang
Vont les robots, bardés de fer et d’argent
Ils ont tous le pas
Un robot ne perd pas le pas, il ne peut pas
Ils ont dans les yeux
Comme une larme, mais ce n’est pas une larme
C’est un cristal creux
Et c’est une arme qui rendrait un homme heureux
Le bonheur est sur la mer lointaine, tendrement
Comme quand on a tout le temps
C’est dans une île incertaine
Un arbre qui doit fleurir
Il faut émonder le monde
Et pêcher en eau profonde
Et s’empêcher de mourir
L’homme est bien la pomme
De l’homme