Ophélie

Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles…

Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir;
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir

Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule
Sur son grand front rêveur s'inclinent les roseaux

C'est qu'un souffle , tordant ta chevelure
A ton esprit rêveur portait d'étranges bruits;
Que ton coeur écoutait le chant de la Nature
Dans les plaintes de l'arbre et les soupirs des nuits;

C'est que la voix des mers folles, immense râle
Brisait ton sein d'enfant, trop humain et trop doux;
C'est qu'un matin d'avril, un beau cavalier pâle
Un pauvre fou, s'assit muet à tes genoux!

- Et le Poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys

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