Une Épave De Plus
Regarde ces cadavres entassés.
Sens-tu qu'ils ont peur?
Touche-les, écoute-les pleurer.
Sens-tu qu'ils s'en veulent?
Dans cette grande fête des morts, l'ivresse vient aux plus rêveurs.
Dans leurs cœurs cœurs vidés d'espoir, savent-ils que nous sommes des leurs?
Prends tout, moi j'ai déjà sombré.
Le navire coule sous les assauts des vagues et tout devient peu à peu trouble.
Je rampe dans les éclats de verre parmi tous ces corps pour attraper ta main.
Tiens-moi, serre-moi fort, je me sens si seul.
Dis-moi qu'il en reste encore.
La surface est bien trop loin pour respirer.
Quitte à toucher le fond, autant le faire en beauté.
Pourquoi est-elle toujours aussi belle?
Il reste du sang dans ses cheveux fauve et ses yeux noirs trahissent ses mensonges.
Pourquoi suis-je aussi bien dans ses bras?
Ses mains esquissent des univers sur ma peau.
Sa parole manichéenne est architecte de mes désirs.
Des appâts de sa geste au désastre de cette chute.
D'un vaisseau supraluminique à une galère en dérive.
Nos réserves s'épuisent, pourquoi tu t'acharnes?
Rester et mourir, partir pour mourir ailleurs.
Regarde ce qu'il reste de nous, maigres, essoufflés, désespérés.
Rends-toi à l'évidence, nous avons échoué.
Dans cette cave humide et froide, combien de temps sommes-nous restés?
En fin de compte, juste une épave de plus.
Une épave de plus.
On ne sera qu'une épave de plus.