Le cygne
Il glisse sur le bassin, comme un traîneau blanc
De nuage en nuage. Car il n'a faim que des nuages floconneux
Qu'il voit naître, bouger, et se perdre dans l'eau
C'est l'un d'eux qu'il désire. Il le vise du bec
Et il plonge tout à coup son col vêtu de neige
Puis, tel un bras de femme sort d'une manche, il retire
Il n'a rien
Il regarde : les nuages еffarouchés ont disparu
Il ne reste qu'un instant désabusé
Car lеs nuages tardent peu à revenir, et
Là-bas, où meurent les ondulations de l'eau
En voici un qui se reforme
Doucement, sur son léger coussin de plumes
Le cygne rame et s'approche...
Il s'épuise à pêcher de vains reflets
Et peut-être qu'il mourra, victime de cette illusion
Avant d'attraper un seul morceau de nuage
Mais qu'est-ce que je dis?
Chaque fois qu'il plonge, il fouille du bec
La vase nourrissante et ramène un ver
Il engraisse comme une oie