Acariâtre
Ils sont vivants,
Mais ne s'en rendent compte.
Intérieur en cendre,
Extérieur en fonte.
Ils ne laissent surtout rien transparaître
Dans leur existence sans queue ni tête.
Ils marchent tous les yeux figés,
Fixés dans le vide,
Absorbés dans leurs pensées,
Le front ondulé de rides.
Ils ne trouvent plus aucun plaisir
Et préfèrent se plaindre
Que de sourire ou que d'en rire.
Ils n'osent saisir leur chance
De peur qu'elle tourne.
Et tournent en rond,
Font trois petits tours
Et tournent court.
Ils ne voient dans le soleil
Qu'un faiseur d'ombre.
Je les vois rester dans l'idée
D'entretenir et cultiver
Leur jardin aride et desséché
Où plus rien ne s'obstine à pousser.
Ils marchent tous les polings serrés, sérieux et rigides,
Comme prisonniers dans un halo de colère invisible
Où il n'y aurait rien de plus pénible que de vivre.
Mais n'est-ce pas terrible?
Ils n'osent saisir leur chance
De peur qu'elle tourne.
Et tournent en rond,
Font trois petits tours
Et tournent court.
Ils ne voilent dans le soleil
Qu'un faiseur d'ombre.
Et n'osent saluer le ciel
De peur qu'il tombe.