La Bohème [Olympia 1978]
Je vous parle d'un temps
Que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître
Montmartre en ce temps-là
Accrochait des lilas jusque sous nos fenêtres
Et si l'humble garni
Qui nous servait de nid
Ne payait pas de mine
C'est là qu'on s'est connu
Moi qui criait famine
Et toi qui posais nue
La bohème, la bohème
Ça voulait dire
On est heureux
La bohème, la bohème
Nous ne mangions qu'un jour sur deux
Dans les cafés voisins
Nous étions quelques-uns
Qui attendions la gloire
Et bien que miséreux
Avec le ventre creux
Nous ne cessions d'y croire
Et quand quelques bistros
Contre un bon repas chaud
Nous prenait une toile
On récitait des vers groupés autour du poêle
En oubliant l'hiver
La bohème, la bohème
Ça voulait dire
Tu es jolie
La bohème, la bohème
Et nous avions tous du génie
Souvent il m'arrivait
Devant mon chevalet
De passer des nuits blanches
Retouchant le dessin
De la ligne d'un sein
Du galbe d'une hanche
Et ce n'est qu'au matin
Qu'on s'asseyait enfin
Devant un café-crème
Épuisés mais ravis
Fallait-il que l'on s'aime
Et qu'on aime la vie
La bohème, la bohème
Ça voulait dire
On a vingt ans
La bohème, la bohème
Et nous vivions de l'air du temps
Quand au hasard des jours
Je m'en vais faire un tour
À mon ancienne adresse
Je ne reconnais plus ni les murs, ni les rues
Qui ont vu ma jeunesse
En haut d'un escalier je cherche l'atelier
Dont plus rien ne subsiste
Dans son nouveau décor Montmartre semble triste
Et les lilas, tous les lilas sont morts
La bohème, la bohème, on était jeunes
On était jeunes, on était fous, mais fous
La bohème, mais la bohème
Ça ne veut plus rien dire du tout